Les travaux de restauration de la bibliothèque du Dauphin ont débuté en octobre 2020. Aujourd’hui, nous vous donnons des nouvelles du chantier !
Les premières étapes de la restauration ont permis la suppression de la couche de peinture à l’essence qui avait été réalisée entre 1960 et 1963, appliquée sur des ouvrages entièrement décapés. Fracturée et instable, la corniche a été consolidée grâce à des goujons et des agrafes et ses lacunes ont été comblées. Quant à ses apprêts[1], ils ont été allégés pour redonner leur relief aux volumes et aux petits motifs.
Les lambris ont aussi été restaurés, avec la mise en œuvre de flipots[2], la consolidation des éléments instables et la restitution des ornements cassés. Le lambris a été dévernis, et la couche picturale appliquée entre 1960 et 1963 qui le recouvre a été allégée. En effet, celle-ci, réalisée à la peinture à l’essence à la manière du vernis Martin, suivait les tons « bleu de Prusse » sur les parties moulurées et « jaune jonquille » sur les fonds. Or, ce jaune prenait pour référence un blanc que les vernis avaient jauni en vieillissant. Ce ton « jonquille » avait été fortement atténué par un « jaune paille » très pâle en 1980, mais qui ne rendait pas justice à l’association chromatique originelle.
Une élévation nord, une niche fut créée en 1953, par analogie aux niches est et ouest, mais un plan de 1755, retrouvé dans le cadre des études, montre qu’elle n’a pas de fondement historique. Cette niche apocryphe a été déposée et les panneaux modernes remployables ont été adaptés, dans le but de retrouver la disposition ancienne attestée.
Les phases du chantier actuellement en cours visent à l’élaboration de la partie haute du trumeau[3] nord, d’après les documents anciens et le décor existant, sans effet de niche. Un panneau sera créé pour la partie haute du trumeau, dont les ornements seront sculptés.
Dans le souci de retrouver de la justesse et de l’harmonie dans la pièce, le cartouche au-dessus du trumeau de la face ouest a entièrement été refait à neuf, avec un fond quadrillé à treillage. Un tirage en plâtre et un modelage en terre ont été réalisés à partir du cartouche présent sur la face sud de la pièce.
Enfin, des essais de remise en peinture de la pièce sont à l’œuvre, le choix ayant été fait de repartir sur les décors de 1756 d’Etienne-Simon Martin en bleu et coloris au naturel sur des fonds blanc à l’imitation de la porcelaine.
Le programme de restauration actuel permettra de corriger certaines interprétations faites lors des restaurations antérieures, plus ou moins rigoureuses. Au niveau de la couleur notamment, les couleurs appliquées dans les années 60 sont trop uniformes. Afin de restructurer les éléments et créer de la variété dans ce décor jauni sans déstructurer le tout, un contraste sur les motifs sera recréé grâce à un camaïeu de bleu.
En amont, une étude analogique de la polychromie a également été menée grâce à des décors en vernis Martin toujours existants. Deux éléments de référence présentant à la fois des parentés stylistique et chronologique avec la bibliothèque du Dauphin permettent de mesurer la richesse décorative des lambris :
– le décor du « cabinet des poètes » du château de Versailles qui comporte des parties anciennes peu touchées par les restaurations ;
– ainsi qu’un panneau sculpté peint au naturel du château de Crécy (aujourd’hui conservé au Musée des Arts Décoratifs), qui a gardé son décor peint vert et blanc du XVIIIe siècle intact. Nous pouvons observer sur ce panneau l’utilisation subtile de différentes teintes de vert et des rehauts, non seulement sur les parties peintes, mais aussi sur les parties sculptées, aspect qui a disparu du décor de la Bibliothèque du Dauphin.
Une fois ce travail achevé, débuteront la remise en teinte des lambris et de la corniche, ainsi que la restauration de la dorure des bordures de glace et des dessus-de-porte.
De même, la serrurerie, en cours de restauration, sera à remettre en place. Cela concerne notamment les espagnolettes[4] en bronze doré et les serrures des bibliothèques en fer doré. Pour certains éléments, la dorure d’origine a pu être conservée.
Nous remercions chaleureusement Frédéric Didier, Architecte en Chef des Monuments Historiques, et Alexis Muller, Architecte de l’agence 2BDM, pour toutes les précisions qu’ils nous ont apportées sur ce chantier.
Retrouvez les détails du projet de restauration et la vidéo réalisée par Frédéric Didier, Architecte en Chef des Monuments Historiques, pour les Amis de Versailles dans notre article : La Bibliothèque du Dauphin : Toute l’histoire !
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[1] Apprêt : couche de préparation qu’on applique de façon plus ou moins épaisse sur le support avant la peinture, en une ou plusieurs couches
[2] Flipots : petite pièce de bois permettant de dissimuler une fente ou un défaut
[3] Trumeau : glace décorant le dessus d’une cheminée ; panneau de bois sculpté, peinture ornementale au-dessus d’une telle glace
[4] Espagnolette : système de fermeture de châssis (fenêtre, volet, porte) composé d’une tige de fer munie d’une poignée tournante et dont les extrémités à crochets viennent s’emboîter dans des gâches
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