Acquisition de deux carnets de dessins et croquis
Grâce au mécénat de MM. Olivier Obst et Frank Troncoso, la Société des Amis de Versailles a récemment offert au Château deux carnets de dessins et croquis, réalisés vers 1698 par les ducs d’Anjou...
La restauration de la Bibliothèque du Dauphin, 400ème projet de mécénat des Amis de Versailles, touche à sa fin. Pour remercier les donateurs ayant participé à ce projet, deux visites du chantier avant la réouverture au public de l’Appartement restauré ont été organisées le 28 septembre et le 4 octobre 2021, sous la conduite de Frédéric Didier, Architecte en chef des Monuments historiques.
La bibliothèque est située au rez-de-jardin du corps central, dans l’aile du midi avec une exposition plein sud, ce qui en fait un espace très agréable. Cependant cette pièce n’a pas toujours gardé cette fonction suivant les siècles.
Le saviez-vous ? La première pièce construite à cet endroit était une chambre dédiée au Grand Dauphin, fils de Louis XIV.
En 1747, c’est à cet endroit que se trouve le cabinet de retraite du Dauphin Louis Ferdinand de France. Il fait la jonction entre ses espaces privés et ceux de sa nouvelle épouse Marie-Josèphe de Saxe. La pièce est transformée en bibliothèque huit ans après, en 1755, sur demande du Dauphin.
Ange-Jacques Gabriel, Premier architecte du Roi, se charge de sa conception. Du cabinet de retraite, il conserve uniquement la cheminée, une partie des trumeaux, quelques panneaux et probablement la frise intermédiaire. Il y ajoute des armoires pour les livres créant donc un espace plus petit, propice à un lieu de travail.
Les frères Martin, peintres, doreurs et vernisseurs de Paris, sont chargés de doter la bibliothèque d’un décor polychrome avec un effet de porcelaine aux dominantes blanches et bleues, ainsi que des motifs floraux peints au naturel sur les lambris.
L’intimité de cette nouvelle pièce est renforcée par son accès, se limitant juste à une petite porte dans le fond de la salle menant à un escalier puis à un petit couloir permettant de rejoindre le Grand Cabinet (aujourd’hui ces deux pièces se succèdent en enfilade grâce a de grandes portes).
La bibliothèque restant pendant plusieurs années un cabinet de travail et d’études pour les Dauphins successifs, la transformation suivante de cette pièce arrive à la fin du XVIIIème siècle, en 1789.
En effet, le Dauphin Louis-Charles, fils de Louis XVI, âgé seulement de 4 ans, est trop jeune pour posséder un cabinet de travail. L’espace est donc restructuré pour y installer une chambre, c’est dans ce contexte qu’une alcôve est créée pour placer le lit de la gouvernante (voir la photo du plan à gauche).
Après la période de la Restauration, la pièce est entièrement repeinte en blanc et or, car la polychromie est passée de mode à cette époque.
Sous le règne de Louis-Philippe, la création d’une enfilade des pièces entre le Grand Cabinet du Dauphin et le Cabinet de la Dauphine s’inscrit parfaitement dans la nouvelle dynamique de muséification du Château, insufflée par le Roi des Français. La chambre devient alors une pièce commémorative, l’alcôve est rebouchée et remplacée par un grand tableau, les armoires et les livres sont retirés, les portes décrochées et mises en réserve.
Puis en 1898, souhaitant restaurer la pièce, les boiseries sont entièrement décapées. De plus, à cause de mauvaises interprétations et par manque de témoins et de traces, une peinture blanche est alors appliquée à l’ensemble de la pièce sauf sur les boiseries qui resteront décapées pendant plus de 50 ans.
Une restauration est lancée dans les années 1960 d’après la seule porte témoin retrouvée dans les réserves, ayant échappée au grand décapage de 1898. Mais là encore, un défaut d’interprétation vient altérer la bonne restitution des décors d’antan. En effet, la colle vernie, utilisée pour la peinture au XVIIIème siècle, vieillie particulièrement mal ; le blanc devient jaune et le bleu devient vert. Une couleur jaune jonquille a donc été appliquée, pensant être la couleur d’origine de la porte.
En 1980, un jaune allégé a été peint pour obtenir une teinte plus claire. Cette teinte et ce décor resteront jusqu’à la restauration d’octobre 2020.
De nombreuses recherches dans les archives, ainsi que des études comparatives, ont été engagées pour mener à bien ce projet de restauration. L’objectif étant de retrouver au plus près l’apparence de la bibliothèque d’origine datant de 1755. Cette restitution complète du décor se base uniquement sur des interprétations de dessins d’époque.
Afin de retrouver son aspect d’origine des travaux architecturaux ont été entrepris.
La niche, fabriquée suite à une erreur d’interprétation des dessins de Monsieur Gabriel, a été « cicatrisée » en ramenant le miroir qui la composait au même niveau que le mur.
La cheminée, déjà présente dans la pièce avant la création de la Bibliothèque du Dauphin, ainsi que les lambris, ont été conservés.
Les bordures de trumeaux du XVIIIème siècle ont été vendus avec les glaces pendant la Révolution. Ils ont donc du être remplacés.
La différence principale avec la bibliothèque originale concerne la conservation des enfilades créées par Louis-Philippe. Les portes ont été habillées en trompe-l’œil avec de faux livres (il n’y a pas d’armoires), car c’est un processus lent et coûteux de remplir des armoires de livres d’époque.
La volonté de ne pas rendre un effet de « faux vieux », mais plutôt un état neuf de la pièce, est un véritable parti pris par le service de conservation, souhaitant se rapprocher de l’aspect de porcelaine de 1755.
Malgré un nettoyage très difficile, le décapage soigné a miraculeusement permis de retrouver des teintes, cependant très abimées par les nombreuses restaurations. Il a donc été décidé de reprendre la restauration ex nihilo pour créer un décor plus plausible.
Sans fragments témoins et donc toujours dans l’interprétation, les restaurateurs ont recherché des exemples pertinents sur lesquels s’appuyer parmi les pièces peintes au naturel du Château de Versailles comme ; le « cabinet des poètes » et un panneau vierge du Château de Crécy réaliser par Martin vers 1750.
Presque quatre mois ont été nécessaires pour choisir les teintes se rapprochant de la chromatique originelle. Au total, trois bleus différents ont été utilisés pour restaurer le décor polychrome de la Bibliothèque du Dauphin.
La place conséquente sur les panneaux aurait pu conduire à une grande liberté, notamment en peignant directement sur la boiserie des ornements style rocaille comme ceux d’origine. Cependant, afin de restituer l’intention de base, toute volonté d’invention de décors a été exclue.
Les méthodes de peintures traditionnelles ont été abandonnées au profit du glacis et de vernis plus modernes et plus stables, afin d’éviter le risque de jaunissement.
Pour finir, les tableaux et le reste du mobilier seront installés après la fin du chantier, en novembre 2021.
En attendant de pouvoir accéder à la Bibliothèque du Dauphin dans le circuit de visite libre, vous pouvez retrouver ici nos articles précédents concernant le projet de restauration :
Participez à ce 400ème projet de la Société des Amis de Versailles, en faisant un don avec réduction d’IFI ou un don sur notre site internet